J’ai lu L’Héritage des Rois Passeurs de Manon Fargetton [Prix Imaginales 2016]

Dans cette histoire, Manon Fargetton a choisi de nous conter la découverte d’un lieu fantastique par Énora, un monde qui se répond en miroir, d’un côté l’Ombre, de l’autre Rive, images parfaites l’une de l’autre, mais si différentes dans le fond. Énora en devient malgré elle la Passeuse, seul recours pour sauver l’Ombre et la Rive et le royaume de Ravenn, devenue chasseuse de dragon en exil.

Quel est mon avis sur cette lecture ?

C’est un roman complexe, mais court, qui tient en haleine. Le premier chapitre est sincèrement déstabilisant. On commence dans « notre monde », celui qu’on connaît bien, ce qui confère au roman un aspect fantastique déstabilisant, puisque quelques temps après, nous entrons dans de la fantasy pure. Le registre n’est pas simple à saisir non plus, on a l’impression, à voir l’attitude d’Enora ou de Ravenn au début du livre, qu’on tient en mains un roman young adult un peu léger, alors qu’en vérité, la violence se déploie assez rapidement et la complexité des rôles de chacun et de chacune vient densifier l’intrigue principale. Nous faisons la rencontre des Noirs Portraits, d’inspiration très Pulmanienne, car j’y ai vu le même mécanisme des daemons reliés à leurs humains (dans A la croisée des mondes de Philipp Pullman).

Les chapitres sont courts, ce qui maintient le rythme et le lecteur ou la lectrice en suspens. Entre chaque chapitre, l’Autrice propose des interludes par le biais de pièces d’archives fictives, artifices communs à la littérature fantasy ou de science fiction (Fondations, Dune, etc.) pour nous informer du contexte par bribes sans trop en dévoiler. De ce point de vue, Manon Fargetton respecte les règles de l’art, et reste très classique dans sa façon d’écrire.

Son équipée sauvage est peu crédible. Ou alors, ce sont les ellipses et sauts dans le temps qui n’améliorent pas la construction des trios ou binômes. Énora paraît trop bien s’adapter au nouveau monde qu’elle explore, elle n’est guidée que par une sourde colère et un franc besoin de vengeance (ce qui ne rend jamais un roman passionnant à ce stade). On ne comprend pas bien les enjeux des autres, comme Charly ou Julian. Il y a peu d’originalité dans ses personnages, on y retrouve une intrigue de bonne facture et un décor fantasy médiéval intéressant. Toutefois, je ne me suis pas attachée aux deux héroïnes, ni aux protagonistes masculins. Il y’a peu d’explications à la colère et à la haine irrationnelle de certains « vilains méchants » sans révéler qui est qui, ou en tout cas, il nous manque quelques couches pour étoffer l’enveloppe vide de certains personnages, dont Jana, la peintre.

Finalement, en ressentant très peu d’empathie pour ces femmes, je me suis désintéressé de leur sort, et je n’ai pas été surprise par le dénouement (avec des personnages qui jouaient un double rôle). Les liens d’affection entre tous et toutes semblent trop factices. J’ai préféré l’ambiance, les belles descriptions, les batailles épiques, à la surenchère de bons sentiments ou de détestation entre nos héros et héroïnes.

Un peu bancal, L’héritage des rois passeurs est tout de même un vrai page-turner autour d’un univers bien construit qui pâtît de certaines scènes trop courtes ou trop incohérentes avec le reste. Néanmoins, je vous le conseille si vous aimez les héroïnes badass et les romances LGBTQIA+.

Signé Tassa

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